La rumeur, l’œuf et la poule

Selon des études menées depuis près de 80 ans – et dont les résultats sont hélas constants – cités dans cairn.info, la quasi-totalité des rumeurs véhiculent des croyances négatives et anxiogènes (66% sont des contenus liés à l’agression et à la haine entre les gens ou les groupes sociaux, 25% des informations générant peur et angoisse etc.). Seulement 2 % renvoient à des désirs, à du positif !

trop tôt ou trop tard, le démenti est toujours « trop »

La force de la rumeur vient de sa simplicité et de sa viralité. La combattre est donc difficile. Si le démenti est apporté trop tôt, il court en effet le risque de la renforcer. Comme un suspect qui se défend avant d’avoir été formellement accusé : c’est donc qu’il a quelque chose à se reprocher (« il n’y a pas de fumée sans feu »). 21% des gens croyant à une rumeur déclarent en avoir entendu parler pour la première fois lorsque cette dernière a été démentie !

étude Jacquart-Haas, 2006

21% des gens croyant à une rumeur déclarent en avoir entendu parler pour la première fois lorsque cette dernière a été démentie !

Mais si l’on attend à l’inverse trop longtemps, la rumeur s’est déjà métastasée et sa crédibilité en a été renforcée. De plus, le démenti fait souvent appel à des preuves scientifiques plus complexes à expliquer que les faits – simplistes – qu’il dénonce.

De l’humilité, pas de l’humiliation

Mais l’article cité s’intéresse principalement à la fonction sociale de la rumeur (expliquer l’inexplicable, renforcer la cohésion du groupe par des valeurs partagées etc.) sans offrir de solutions. En fait, nos biais cognitifs nous poussent à chercher des infos qui confirment nos préjugés (« pré-juger » : c’est là toute la force de la rumeur) et à ignorer celles qui les infirment.

L’impuissance manifeste de ceux qui démentent la rumeur est de se concentrer sur elle et non sur ceux qui la propagent. Il est difficile de changer d’avis puisque ce serait avouer qu’on s’est trompé. On se sent donc un peu ridicule. Or, personne n’aime se sentir ridicule. Pour convaincre quelqu’un de changer d’avis sans l’humilier, il faut lui offrir une porte de sortie honorable : «  »on » l’a trompé », « s’il avait eu toutes les cartes en main, il n’y aurait pas cru », « les choses ont changé depuis qu’il a entendu dire que » etc. Pour tuer la rumeur dans l’oeuf, il faut permettre à la poule de ne pas perdre la face !

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